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Кафедра и трон. Переписка императора Александра I и профессора Г. Ф. Паррота - Андрей Юрьевич Андреев

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donc sur la Russie qu’il dirigera son plan principal; ses mesures pour couper les négociations avec Nov[osilzoff] avant qu’elles soient entamées prouvent qu’il veut se venger, sans passer pour agresseur, comme les relations du cabinet de Berlin vis-à-vis de celui de Pétersbourg prouvent qu’il a su habilement profiter du seul moyen qu’il ait d’attaquer avec avantage3. Ce moyen qui au premier coup d’œil paraît le seul, et qui l’est effectivement sous certains circonstances, se multiplie dans les conjonctures présentes.

Ainsi Bonaparte, avant d’avoir fait marcher un seul régiment, a changé totalement la situation politique de la Russie, qui auparavant ne prenait part aux querelles du sud-ouest de l’Europe que comme alliée ou arbitre, mais qui à présent joue les rôle principal et est forcée de chercher des alliés. Ce changement, à la vérité, n’est peut-être pas encore diplomatiquement exprimé, mais il est réel, fondé dans la nature des circonstances, et je l’avais prévu avant la mission de Nov[osilzoff] à Berlin. Aussi j’opinais toujours absolument contre la guerre, dont les suites, même brillantes, ne compenseront jamais le dommage.

Aucun ne se trompe pas aux démonstrations pacifiques actuelles du cabinet de Berlin. Il est par les raisons alléguées intéressé contre la Russie et se déclarera quand Bonaparte l’exigera officiellement, c.à.d. quand la Russie aura dirigé ses principales forces de l’autre côté. Dans toutes les hypothèses possibles la Russie doit se regarder comme en guerre avec la Prusse. Il existe sûrement quelque traité secret contre cette puissance et la France, et si la Russie veut absolument prendre les armes, il faut s’assurer diplomatiquement des intentions de la Prusse, demander une déclaration publique et catégorique pour pouvoir faire un plan fixe d’opérations et ne pas être tenu par la Prusse en échec.

Bonaparte, ayant gagné ou forcé la Prusse, peut attaquer la Russie au Nord-Ouest ou au Sud, et le fera sûrement si la guerre a lieu en effet. Il renforcera la Prusse de 50 000 hommes, charmé en outre d’avoir une armée au cœur de cet État pour être plus sûr de sa fidélité. Pour empêcher l’Autriche de porter des forces trop considérables de ce côté je ferais marcher par Mannheim, au travers de la Franconie 50 000 hommes sur la Bohême dont les habitants sont déjà affamés, et ne peuvent sûrement pas nourrir même une armée autrichienne. Je placerais 140 000 hommes sur les frontières de la Suisse, sur les bords de l’Etsch et du Po pour attaquer la Suabe autrichienne, le Tirol, et Venise. Je ferais défiler 160 000 hommes le long de l’Italie jusqu’à Otranto, dont 20 000 garderaient l’Italie et le reste, 140 000 seraient débarqués au moyen de bateaux plats ou de vaisseaux marchands, sur la côte d’Albanie. 40 000 de cette armée du Levant4 s’emparerait des passages de la Macédoine et des Dardanelles. Le reste marcherait au Nord et prendrait possession des bouches du Danube et du Dniester. En même temps une division de la flotte française évitant les anglais arriverait à l’Archipel, et entrerait dans la mer Noire d’où elle couperait les approvisionnements que les armées russes pourraient tirer des côtes.

Le trajet du Cap Orso au petit Golfe de Valona n’est que de 45 Werste; la faiblesse du gouvernement turc exposé à des révoltes journalières même en temps de paix et la haine des turcs contre les autrichiens et les russes assurerait le succès de l’entreprise, qui se trouverait secondée par l’armée de la haute Italie pour peu qu’elle fit de progrès, en sorte qu’il s’établirait une communication entre les deux armées principales au travers de la Dalmatie, communication même, qui, vu la grande futilité vassale de la Turquie et la facilité de révolutionner cet État, ne serait pas indispensable.

Ce plan de campagne ou tout autre semblable est très plausible et est extrêmement facilité par la Prusse qui occupera la majorité des forces de la Russie. Sans elle (la Prusse) il est inexécutable, parce que la Russie portant ses forces principales sur le midi est bien plus à portée de couvrir la Turquie que la France de l’envahir.

Pour repousser cette double attaque la Russie doit faire marcher sur la Prusse au moins 170 000 hommes et l’Autriche 30 000, les forces prussiennes et françaises en Prusse faisant un total de 200 000 hommes. L’Autriche doit faire armer au moins 50 000 hommes en Franconie, en Italie 140 000 hommes et en Turquie le long du Golfe de Venise jusqu’à Corfou au moins 30 000 hommes. Tandis que 80 000 russes entreront par la Moldavie et la Walachie pour pénétrer jusqu’aux Dardanelles si le gouvernement turc ne voulait pas lui en laisser prendre possession par mer à l’amiable.

La Russie doit en outre, en réunissant ses principales forces contre la Prusse, augmenter par mer les troupes de Corfou, tenir une armée considérable sur les frontières turques, faire observer de Corfou les manœuvres des français en basse Italie, exiger qu’une forte escadre anglaise croise autour de l’Italie pour soutenir Corfou au besoin et lui fournir des nouvelles qui seront remises au plus tôt par Constantinople et la mer Noire à Oczakow. Il sera même nécessaire d’envoyer à Oczakow un plénipotentiaire, soit pour traiter en moins de temps avec la Turquie, soit pour ordonner la marche de l’armée dès que les nouvelles de Corfou annoncent que l’armée française se renforce dans la basse Italie au-dessus de 30 000 hommes.

Ce plan de campagne de la part de la Russie pourra seul prévenir l’attaque de ce côté-là et même la chute de l’Empire Ottoman en Europe, et est par conséquent légitime. Attaquer directement cet Empire, présentement, par pure précaution, serait une injustice qui ne serait pas même utile.

Il y a un autre plan, celui d’écraser la Prusse le plus tôt possible de toutes les forces de la Russie, pour la forcer à la paix5. Mais d’un côté on n’écrase pas la Prusse en 6 semaines; de l’autre quand cela réussirait jusqu’à un certain point, les affaires n’en seraient pas mieux en état; la France dirigerait ses forces principales sur la Prusse, en ne se tenant que sur la

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